Présentation de la musique, La Pellegrina et les Intermèdes (1589) - Description de l’Appareil et des Intermèdes faits pour la Comédie représentée à Florence lors des Noces des Sérenissimes Don Ferdinando Medici et Madame Christine de Lorraine, Grands Ducs de Toscane. Firenze, 1589, Traduction d’Anne Surgers, Vijon, Lampsaque, coll. Le Studiolo-Essais, 2010.
ISBN 2911825144
This presentation of the melodramatic reform and its musical implications was written as a preamble to the work of translation and commentary made by A. Surgers on two fundamental texts describing the interludes of the Pellegrina (Florence, 1589). Quid is musica? Scientia canendi rect. This definition originally proposed by St. Augustin, then taken by Boethius will be a reference by all theorists of the Middle Ages until Glarean and his contemporaries; they consider music in its twofold aspect, as the science of singing, i.e. art to modulate the verb according to agreed melodic rules and science of the sound as related to the number, as a discipline of the quadrivium. Very gradually, the music will change from purely scientific to the field of rhetoric, under the influence of humanist thought, centered on the verb in all its forms, written, recited or sung. If the way to consider the musical problem evolve, the only remaining reperoire worthy of study, since ancient times, is the vocal repertoire; instrumental music booming in the sixteenth century, is considered as inferior, according to the hierarchical conception in force. Experiments of Giovanni Bardi and his Camerata conducted for several years about the relationship between text and music, seeking the recitar cantando, is one of the most brilliant achievements of numerous literary and philological reflections of the time. This study, based on the writings of the Camerata composers who participated in the Interludes, presents a synthesis of their research and experimentation.
Au commencement était le Verbe…
Quid est musica ? Scientia recte canendi[1]. Cette définition originellement proposée par saint Augustin, puis reprise par Boèce servira de référence à tous les théoriciens du Moyen Age et de la Renaissance, jusqu’à Glaréan et ses contemporains ; ceux-ci considèrent la musique sous son double aspect, comme science du chant, autrement dit art de moduler le verbe selon des règles mélodiques convenues, et comme science du son relié au nombre, en tant que discipline du quadrivium. Ce n’est que très progressivement que la musique passera du champ purement scientifique à celui de la rhétorique, sous l’influence de la pensée humaniste, centrée sur le verbe sous toutes ses formes, écrit, déclamé ou chanté. Si la manière de considérer les problématiques musicales évoluent, le seul répertoire digne d’étude demeure, depuis l’Antiquité, le répertoire vocal ; la musique instrumentale, en plein développement récent, reste malgré tout un genre inférieur, selon la conception hiérarchisée de la composition musicale en vigueur. Les expérimentations de Giovanni Bardi et de sa Camerata fiorentina menées pendant plusieurs années autour de la relation entre texte et musique, à la poursuite du recitar cantando, constituent un des plus brillants aboutissements des nombreuses réflexions littéraires et philologiques de l’époque.
Dans quel contexte s’effectuent ces expérimentations et qu’amènent-elles de neuf dans le paysage théorique et musical du XVIe siècle ? Au sein de la Camerata, Bardi et les autres musiciens, plutôt praticiens, chanteurs et compositeurs, partagent-ils tous le même point de vue sur la « riforma melodrammatica » et les solutions pratiques à y apporter ? Nous tenterons de fournir quelques éléments de réponse à ces questions, avant d’examiner la situation des Intermèdes de La Pellegrina par rapport à l’esthétique défendue par la Camerata, et à d’autres productions musicales de l’époque.
[1] Ms. theol. Lat. qu. 261, Berlin, Staatsbibliothek Preußischer Kulturbesitz, origine italienne, daté 1292, f. 23 (addition),