Bruxelles, carrefour européen de l’orgue, éd. Prof. Jean Ferrard, Bruxelles, SIC, 2003, p. 71-81 (10 p.)
Les Pays-Bas, «pépinière musicale de l’Europe », «école de chant de l’Europe » 1, entrent au XVIIe siècle dans une période de grandes difficultés économiques, de troubles religieux avec les Provinces-Unies et de guerres dévastatrices où s’affrontent, entre autres, la puissance militaire des Habsbourg et celle des Bourbons. De plus, le protectionnisme français ne fait qu’aggraver les mauvaises relations entre les deux voisins, alors que, paradoxalement, les Pays-Bas nouent des liens politiques et culturels très étroits avec l’Espagne - en proie elle-même à une grave crise économique - et l’Autriche, pays si éloignés géographiquement. Tout concourt au déclin de la région, tandis que la musique italienne connaît, en revanche, un rayonnement croissant, partout en Europe.
L’important mouvement nord/sud des musiciens et des facteurs franco-flamands amorcé au XVe siècle, mouvement sans précédent en Europe, continue encore au cours des premières décades du XVIIe siècle et a tendance à occulter les influences qui ont pu s’exercer sur les Pays-Bas, en particulier au moment où l’hégémonie musicale franco-flamande est progressivement supplantée par le développement d’autres écoles européennes. Les influences espagnoles, anglaises ou italiennes dans le domaine du clavier en général, ont été commentées de multiples fois. De Cornet à Chaumont, qu’en est-il du rôle joué par la France dans ces échanges ? Par quels biais ont-ils pu avoir lieu ? Le faible nombre de documents strictement bruxellois ne permettrait pas de répondre valablement à ces deux questions. Il nous a donc paru nécessaire d’élargir les limites géographiques de notre étude à l’ensemble des Pays-Bas méridionaux, pour disposer d’un nombre plus significatif d’éléments.
Après quelques remarques sommaires sur la situation de l’orgue et des organistes dans les Pays-Bas, nous tenterons d’établir un bilan des influences venues de France – parfois prouvées par les documents, d’autres fois simplement supposées – dans la facture et dans la musique d’orgue.